Comme Ils Disent

Ce fils d'immigrés arméniens est arrivé en haut de l'affiche à force de volonté. "Je m'voyais déjà" chantait-il en 1960. Il aura mis vingt ans pour gravir une à une les marches du succès. Depuis Aznavour est devenu le chantre de la chanson romantique à travers le monde. Aujourd'hui, à plus de 80 ans, il est un des classiques de la chanson française voire internationale.

Il est né à Paris, par hasard, le 22 mai 1924. En effet, ses parents attendaient en France un visa en vue d'un départ pour les Etats-Unis. Son père, Micha, arménien né en Géorgie, est le fils d'un ancien cuisinier du Tsar Nicolas II. Quant à sa mère, Knar, elle est issue d'une famille de commerçants arméniens de Turquie.

Micha, ancien baryton, ouvre un petit restaurant arménien à Paris où il chante pour les exilés d'Europe centrale. Avec sa femme, comédienne, ils élèvent leurs deux enfants, Charles et sa soeur aînée, Aïda, dans une atmosphère de musique et de théâtre au milieu des nombreux artistes qui fréquentent le petit restaurant de la rue de la Huchette.

Après la crise économique de 1929, la famille Aznavourian s'installe rue du Cardinal-Lemoine : en face de l'école du Spectacle ! En 1933, ils y inscrivent leur fils qui rêve de devenir acteur.

Très vite, Charles fait de la figuration puis débute dans des petits rôles au théâtre et au cinéma. En 1939, Micha Aznavourian s'engage comme volontaire dans l'armée et Charles quitte l'école du spectacle pour travailler. En 1941, il rencontre un jeune auteur compositeur, Pierre Roche, avec qui il écrit un duo et écume les cabarets de la capitale. Le monde du spectacle les adopte.

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Charles Aznavour - Comme Ils Disent
 
 

J’habite seul avec maman
Dans un très vieil appartement
Rue Sarasate
J’ai pour me tenir compagnie
Une tortue, deux canaris
Et une chatte
Pour laisser maman reposer
Très souvent je fais le marché
Et la cuisine
Je range, je lave, j’essuie
A l’occasion je pique aussi
A la machine
Le travail ne me fait pas peur
Je suis un peu décorateur
Un peu styliste
Mais mon vrai métier, c’est la nuit
Que je l’exerce, travesti
Je suis artiste
J'ai un numéro spécial
Qui finit en nu intégral
Après strip-tease
Et dans la salle je vois que
Les mâles n’en croient pas leurs yeux
Je suis un homo
Comme ils disent

Vers les trois heures du matin
On va manger entre copains
De tous les sexes
Dans un quelconque bar-tabac
Et là, on s’en donne à cœur joie
Et sans complexe
On déballe des vérités
Sur des gens qu’on a dans le nez
On les lapide
Mais on le fait avec humour
Enrobé dans des calembours
Mouillés d’acide

On rencontre des attardés
Qui pour épater leur tablée
Marchent et ondulent
Singeant ce qu’ils croient être nous
Et se couvrent les pauvres fous
De ridicule
Ca gesticule et parle fort
Ca joue les divas, les ténors
De la bêtise
Moi les lazzis, les quolibets
Me laissent froid puisque c’est vrai
Je suis un homo
Comme ils disent

A l’heure ou naît un jour nouveau
Je rentre retrouver mon lot
De solitude
J’ôte mes cils et mes cheveux
Comme un pauvre clown malheureux
De lassitude
Je me couche mais ne dors pas
Je pense à mes amours sans joie
Si dérisoires
A ce garçon beau comme un dieu
Qui sans rien faire a mis le feu
A ma mémoire
Ma bouche n’osera jamais
Lui avouer mon doux secret
Mon tendre drame
Car l’objet de tous mes tourments
Passe le plus claire de son temps
Aux lits des femmes
Nul n’a le droit en vérité
De me blâmer, de me juger
Et je précise
Que c’est bien la nature qui
Est seule responsable si
Je suis un homo
Comme ils disent

 
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